“Mon amour mon amour”
Charlotte Denamur
Exposition du 17 mars au 5 mai 2017



Dans l’atelier, elle peint souvent au sol - quitte à y intégrer les poussières et les paillettes de peintures laissées précédemment. Ces imprégnations matérielles de contact sont d’ailleurs accueillies avec enthousiasme et curiosité par l’artiste. Elles participent de cette intuition tactile qui est le processus d’élaboration des surfaces colorées produites par Charlotte Denamur. Il est question de relation entre des matérialités, des couleurs et des formes qui se génèrent réciproquement. Charlotte parle d’ailleurs de la manière dont ses gestes interagissent avec la matière, qui produit en retour la particularité du geste pictural.

Il est donc aussi question d’assemblage de textures, de jointures, de rencontres opportunes et surtout de la matérialisation de la profondeur : celle de la surface comme des sentiments. Anti-héroïques, ces surfaces se donnent à expérimenter car, une fois re-positionnées dans l’espace, elles déjouent les perspectives et forcent des jeux de mobilités corporelles : s’accroupir pour percevoir un horizon, soulever du doigt le drap d’une surface teintée, briser son intimité et sa complexité, se pencher et considérer les revers des tissus afin sans doute de mesurer la distance qui sépare l’être de la chose désirée : des rapports de secrets.

Pour son exposition à la galerie Tator, Charlotte Denamur spatialise une nouvelle fois la question du plan et de la surface. La mer (une surface animée et réfléchissante, une ligne horizontale délimitant le plan, une profondeur épaisse, habitée) est ici matérialisée dans l’espace de la galerie. Plan horizontal (Le bassin) ou biais d’une vague (Vague à l'âme), son élévation architecturale redéploie la question du tableau en détournant la mathématique de la profondeur. L’image, comme la mer, ne peut être traversée. Au contraire même, elle fait obstruction et propose un rapport de corps à corps sans déterminer pour autant strictement la position du sujet. La mer sombre qui avalait jusqu’alors les corps (15 mains, 2014) est maintenant imprégnée de pigment rose. Boire la tasse ou de participer à la projection : les mouvements du corps nous font passer d’un espace/état à l’autre, d’un niveau de submersion à une zone bis de contemplation. C’est donc toute la limite de la surface qui vacille avec nous.

Marie Canet, mars 2017

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Avec le soutien des entreprises, Le Géant des Beaux-Arts et Mondial Tissus.
Graphisme: Sarah Vadé  |  Photos © David Desaleux