Garance Deprez
Résidence du 3 fév. au 30 juin 2025
Pendant ma résidence à la Factatory, j’ai travaillé sur différentes formes : sculptures, installations, textes et dessins, dérivés de formes que j’ai défini comme des objets de violence. Je suis partie du motif de la tronçonneuse, identifié au travers du récit personnel d’une amie comme vecteur de discrimination de genre, auquel j’ai attaché des symboliques de masculinité, de pouvoir, de violence. J’ai commencé par les reproduire en les modelant en grès noir, puis en tirant leurs mues en silicone. J’ai ensuite façonné, en grès également, des chaînes de tronçonneuse articulée. Ces techniques de reproduction lentes et méticuleuses m’ont permis de passer du temps avec, en les observant, et en les transposant dans des matières qui les désactivent, les rendent fragiles, précieuses, en les manipulant d’une autre façon que dans leur utilité première.
Souvent, ces objets se cassent, les attachent en grès cèdent, le silicone fin se déchire. Je les répare, avec du fil métallique, avec des sutures chirurgicales en soie noire. Ces réparations sont visibles, elles m’intéressent dans un rapport formel de rencontre de matériaux, mais aussi dans la façon dont elles soulignent la fragilité des objets que je fabrique. Cette fragilité m’intéresse, elle participe à rendre ces objets mouvants, vivants, abîmés, changeant et évoluant au fil des manipulations, des monstrations. Il s’agit aussi d’un rapport de soin que je réfléchis dans mon travail. Ces réparations sont leurs cicatrices, les traces du temps et des fragilités intrinsèques aux matériaux utilisés qui sont éprouvés, et tendent vers l’organique.
Dans la continuité de ces objets de violence, je me suis intéressée à la barrière Vauban, dont j’ai effectué une reproduction molle en silicone. Cet objet urbain, de contrôle des foules, des masses, et de délimitation de l’espace, conserve un rapport aux corps mais en dépasse légèrement l’échelle.
À travers ces différentes formes, et le texte que j’ai produit pendant ma résidence, j’ai essayé de travailler avec des objets dans lesquels je trouvais de fortes charges symboliques, issus de récits et rapports individuels, mais aussi à une échelle plus globale par ce qu’ils incarnent. En les travaillant avec différentes méthodes de reproduction, j’ai tenté de me les réapropprier, de leur donner de nouvelles qualités physiques, de trouver des points de tension entre les différentes violences qu’ils peuvent incarner et une potentielle faille de fragilité, un rapport plus corporel à ceux-ci.
Extrait du texte lu le soir de sa restitution :
Ses dents grincent et les rouages se mettent en marche
L’articulation temporo-mandibulaire s’actionne :
de façon similaire à une charnière, le condyle sort de la fosse temporale, se déplace vers l’avant et vers le bas, dans un mouvement de translation, —> sa mâchoire s’ouvre (.)
Ses dents grincent et tournent,
Le condyle reprends sa place, fermeture de la bouche, et recommence
Sa mâchoire s’active, machinale,
Elle salive . (...)
Photos © Garance Deprez & Hoa Laisney
Pendant ma résidence à la Factatory, j’ai travaillé sur différentes formes : sculptures, installations, textes et dessins, dérivés de formes que j’ai défini comme des objets de violence. Je suis partie du motif de la tronçonneuse, identifié au travers du récit personnel d’une amie comme vecteur de discrimination de genre, auquel j’ai attaché des symboliques de masculinité, de pouvoir, de violence. J’ai commencé par les reproduire en les modelant en grès noir, puis en tirant leurs mues en silicone. J’ai ensuite façonné, en grès également, des chaînes de tronçonneuse articulée. Ces techniques de reproduction lentes et méticuleuses m’ont permis de passer du temps avec, en les observant, et en les transposant dans des matières qui les désactivent, les rendent fragiles, précieuses, en les manipulant d’une autre façon que dans leur utilité première.
Souvent, ces objets se cassent, les attachent en grès cèdent, le silicone fin se déchire. Je les répare, avec du fil métallique, avec des sutures chirurgicales en soie noire. Ces réparations sont visibles, elles m’intéressent dans un rapport formel de rencontre de matériaux, mais aussi dans la façon dont elles soulignent la fragilité des objets que je fabrique. Cette fragilité m’intéresse, elle participe à rendre ces objets mouvants, vivants, abîmés, changeant et évoluant au fil des manipulations, des monstrations. Il s’agit aussi d’un rapport de soin que je réfléchis dans mon travail. Ces réparations sont leurs cicatrices, les traces du temps et des fragilités intrinsèques aux matériaux utilisés qui sont éprouvés, et tendent vers l’organique.
Dans la continuité de ces objets de violence, je me suis intéressée à la barrière Vauban, dont j’ai effectué une reproduction molle en silicone. Cet objet urbain, de contrôle des foules, des masses, et de délimitation de l’espace, conserve un rapport aux corps mais en dépasse légèrement l’échelle.
À travers ces différentes formes, et le texte que j’ai produit pendant ma résidence, j’ai essayé de travailler avec des objets dans lesquels je trouvais de fortes charges symboliques, issus de récits et rapports individuels, mais aussi à une échelle plus globale par ce qu’ils incarnent. En les travaillant avec différentes méthodes de reproduction, j’ai tenté de me les réapropprier, de leur donner de nouvelles qualités physiques, de trouver des points de tension entre les différentes violences qu’ils peuvent incarner et une potentielle faille de fragilité, un rapport plus corporel à ceux-ci.
Extrait du texte lu le soir de sa restitution :
Ses dents grincent et les rouages se mettent en marche
L’articulation temporo-mandibulaire s’actionne :
de façon similaire à une charnière, le condyle sort de la fosse temporale, se déplace vers l’avant et vers le bas, dans un mouvement de translation, —> sa mâchoire s’ouvre (.)
Ses dents grincent et tournent,
Le condyle reprends sa place, fermeture de la bouche, et recommence
Sa mâchoire s’active, machinale,
Elle salive . (...)
Photos © Garance Deprez & Hoa Laisney